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Monter, descendre ... ça glisse pareil.
11 mai 2008

L'été

A nouveau un silence surréaliste plane sur le quartier. Sans plus de préliminaires et avant l'heure, l'été s'abat sur Paris avec la vigueur qui le caractérise, soleil de plomb, air saturé, vêtements  froissés que l'on a pas eu le temps de préparer. Les premiers jours nous sourions et nous nous saluons mutuellement sur les trottoirs ensoleillés, ensuite nous avons chaud, beaucoup s'énervent plus vite que de coutume et les autres écrasés de chaleur restent impavides et transpirants. De fines pellicules de sueur s'installent pour quelques mois sur nos peaux qui resteront vierges de tout bronzage, des jeunes femmes s'installent en bikini sur les espaces verts entre deux artères sursaturées de voitures climatisées d'où on les observera à loisir. Les hommes laisseront échapper de petits morceaux de peaux sur lesquels rêver par le col largement ouvert de leurs chemises. Ils seront beaux, vêtus de lin, moulés dans des jeans clairs, laissant deviner le grain de leur peau sous la transparence d'une chemise blanche.


Paris est toujours surprise par la chaleur, placide la population se plie tant bien que mal aux caprices de la météo. Les premiers jours on aura croisé de malheureuses modasses encore en bottes et blousons de cuir, de sagaces seniors en sandalettes et en vêtements légers, de vagues silhouettes entuniquées dans un espoir de demi saison qui n'existe pourtant jamais ici, des cadres très énervés par leurs costumes trop sombres, aérant aux terrasses des chemises hivernales trempées par des vestes trop épaisses. Très vite la ville se colore, se dénude, s'égaie. Tant de proximité quotidienne entraînant dans son sillage une joyeuse impudeur qui ne choque plus personne. Dans le regard des hommes des étincelles de malice et de joie qui ne s'éteindront qu'avec les pluies d'automne, dans les yeux des femmes l'assurance de se savoir désirées et un zeste de taquinerie. Le temps de l'été vivre à Paris deviendra un jeu de piste, on se suivra, s'interpellera, hommes et femmes se glisseront des regards amusés et complices dans une liberté d'être que l'on expérimente rarement hors de la capitale.


Cette année encore, mes voisins et moi nous congratulerons mutuellement du choix de notre résidence aux murs épais et où il fait encore frais alors que le soleil tape fort à l'extérieur. Nous évoquerons la chance d'être sur un colline surélevée par rapport au reste de ville et parcourue dans la journée par de légers zéphyrs salvateurs dont la population du centre en cuvette reste à jamais privée. En fin de soirée sur les hauteurs nous regarderons la chape polluée recouvrant la ville ayant l'impression de respirer mieux dans notre quartier qu'ailleurs. Nous nous croiserons tous aux terrasses fleuries, fermées et presque campagnardes de lieux tenus secrets et réservés aux riverains.


Cette année comme tous les ans je passerai l'été à Paris, profitant dès la mi juin d'un Paris à moitié déserté et évoluant au ralenti, flânant aux terrasses dans d'inutiles tentatives de bronzage, détaillant les hommes à leur passage, rêvassant à l'apparition d'un improbable Lucas sorti tout droit d'un roman. J'irais chercher un peu d'air au bord de la Seine et m'arrêterai avec délectation sous les brumisateurs de Paris plage. Je croiserai des estivants déjà de retour et plutôt malheureux, d'autres me bousculeront dans une tentative pour ne pas rater le train de vacances. Les jours les plus chauds j'irai me réfugier dans les salles de cinéma, glacées par des climatiseurs fous. Les soirées les plus fraîches j'irai les danser dans des rythmes endiablés avec les écoles de danse qui s'installent pour l'été sur les bords de la Seine. Je m'alanguirai en terrasse verre de rosé et salade fraîche, melon, tomates, mozzarela. J'écouterai les tables alentour parler de leur vacances et ce sera sans regrets. Le soir du 14 juillet j'irai guincher dans les bras des pompiers.



Le chat accusant déjà une chaleur qui pourtant n'en est qu'à ses débuts reste lascivement collé sur les surfaces carrelées, profitant de mes passages dans la cuisine pour venir se faire arroser d'eau fraîche, repartir en s'ébrouant moitié joueur moitié outré et revenir pour une deuxième séance. Par la fenêtre ouverte je me fais interpeller, une bande de joyeux drilles qui ne sont pas les derniers à avoir les yeux qui pétillent s'est installée récemment à quelques balcons de ma fenêtre, c'est l'heure de l'apéro. L'été est revenu.

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