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Monter, descendre ... ça glisse pareil.
3 décembre 2009

Une autre que moi

 aurait su dire non, se faire respecter, elle aurait enchainé son désir à lui à ses pas à elle ; aurait fait des crises d’officialisation, les hommes n’aiment que ça. Elle aurait été émue, mondaine, excentrique juste un poil, attentionnée, elle aurait rougi elle aurait été tendre attendrissante, il n’aurait pas osé avancer sur elle comme il l’a fait sur moi, elle aurait reculé quoiqu’il en soit ne se serait pas laissé faire. Aurait dit : pour qui tu me prends mais ça va pas la tête !!!?


Il aurait reculé interloqué. Mais oui, je la prends pour qui ?

 

Pour moi peut être.

 

 

Elle aurait dit on va où ? Et elle aurait eu faim, expliqué qu’elle préférait diner, apprendre à le connaître elle n’est pas prête, ça l’aurait touché flatté, enfin une qui veut savoir vraiment qui je suis qui ne cède pas tout de suite qui ne m’obéit pas, une qui me surprend pour laquelle j’existerais autrement alors il aurait ravalé son orgueil malmené et l’aurait emmenée diner dans quelque endroit discret peut être déjà réservé au cas où. Pour parler. Ils auraient discuté, étonnés de tant de points communs, émus par des silences complices. L’amour enfin ? Ils se seraient quittés sur un incroyable baiser de quoi patienter sereinement jusqu’à la prochaine fois.


Il l’aurait trouvé sublime, sublimée par le désir. Même sa crise à cause de la vinaigrette trop salée, sublime parce que tant qu’il ne la touche pas, tant qu’il ne s’en approche pas, tant qu’elle se dérobe, le maintient à distance il en crève et puis c’est tout elle peut raconter n’importe quoi, s’énerver, lui faire des sales coups, tant qu’il la rêve il s’en fout. Elle n’est pas n’importe qui elle est quelqu’un à aimer. Elle n’est pas comme les autres.


Pourtant elles font toutes la même chose.

 

Pas moi.

 

Paralysée par l’idée d’esquisser le moindre geste de rejet alors que je ne sais faire que ça depuis la nuit des temps, sourire diaboliquement poser un doigt sur la poitrine recule! détailler des pieds à la tête me casser sans me retourner, emplie d’une fureur souveraine. Encore un qui m’a pris pour une star du porno. Adieu va qui que tu sois. Face à lui je n’ai pas pu, ses mains qui s’avançaient comme une supplique...c’était, pourtant, la même chanson que d’habitude mais je ne pouvais pas esquisser un seul mouvement.

Je ne voulais que me cacher loin de son regard et de ses bras je ne voulais pas qu’il m’attrape je ne voulais pas le repousser mais ce moment incroyable au ralenti ou les deux bras tendus je le met à distance, loin. Je recule dans un coin de fenêtre je dois avoir l’air prête à m’enfuir par les toits. Respirer. Un tel commencement promet une fin toute aussi rapide. A cette idée insupportable, paniquée je cherchais la sortie de secours le mode d’emploi le bouton pause.

 

 

Le visage tourmenté il restait à distance. Il aurait fallu dire quoi ?


 

Je le sais pourtant il faut être odieux, mauvais, capricieux, infect pour être aimé. Parce qu’alors l’autre face à tant d’exigence tant d’intransigeance se met à penser qu’il n’est pas digne se déprécie met l’autre sur un piédestal et bingo. Jackpot. Plus le temps passe plus il se casse en douze pour plaire séduire garder quelqu’un qui n’est jamais content qui n’écoute jamais ce qu’on lui dit qui ne pense qu’à lui. Je sais tout de ça il parait que ça s’appelle l’amour, ça cimente les vies de couple.

 

Il aurait fallu pour bien faire pour être sure de moi ensuite, assise sur la certitude qu’il était à moi qu’il allait me manger dans la main et toutes ces expressions avec des grands mots qui veulent dire la même chose ou l’on est tellement sur que l’autre est acquis, à soi esclave à long terme. Il aurait fallu le repousser et qui sait faire un scandale pour l’obliger déjà à céder de grands pans de son intégrité face à mon égocentrisme ; passage dont la symbolique est définitive. Et alors là j’aurais été calme, sure d’avoir bien fait, sure d’être quelqu’un à aimer, quelqu’un de bien plutôt qu’une qui s’est allongée tout de suite.

 

Mais je ne sais pas être celle là.

 

Un scandale pour avoir l’air respectable ? Des manières pour être aimée ? A quoi bon puisque cela n’aurait pas été moi. Faire tapis c’est tout ce que je sais faire, pour une fois je l’ai fait sans joie, sans cette jubilation terrible de savoir que je vais tout perdre. Je me disais, il ouvre tellement grand les bras peut être qu’il est capable de tout attraper au vol peut être que personne pour une fois ne va être blessé.  

 

 

 

A me voir a-t-il lâché froidement, on n’imaginait pas que cela fut aussi facile. J’ai encaissé le coup sans broncher, tenté de me défendre en démarrant faiblement de grandes phrases qui n’avaient pas leur place au milieu des draps froissés. Quelqu’un avait été blessé et ce n’était pas moi. Je ne savais pas encore car j’étais en train de l’apprendre cet art qu’il a de pousser l’autre contre le mur, doucement par petits coups de têtes en apparence indolores et bien placés. Sans mots pour le convaincre je me rapprochais de lui, soucieuse de le rassurer.


 

L’interrogatoire continuait je répondais tout et n’importe quoi et surtout à côté, inconsciente d’être prise dans ses feux croisés, il obtiendrai quoiqu’il en coûte mes confessions mais de ça j’étais innocente encore. C’était ma reddition totale et absolue qu’il lui fallait pour panser son écorchure. J’ai fini par céder, articulant stupéfaite et poussée par l’inquiétude de le savoir tourmenté des mots que de ma vie je n’ai jamais prononcés. Les yeux baissés j’entendais au ton de sa voix redevenu chaleureux, tendre et dont les pointes amusées m’interloquaient qu’il était satisfait. Il cessa aussi subitement qu’il avait commencé. Je restais silencieuse au bord du lit, hébétée et atrocement consciente de ce qui venait de se produire.


 

Je me suis allongée contre lui et il m’a entourée de ses bras. Je respirais contre sa peau considérant ce qui venait de se refermer autour de moi qui n’était pas encore un étau mais dont bientôt je ne pourrais plus sortir. Mes angoisses étaient vaines, ma peur d’enfant irrationnelle. Nous aurions pu tout aussi bien nous jeter l’un sur l’autre dès le départ sans échanger une parole. Il était inutile que l’on se parle inutile que l’on s’explique inutile que je lui dise, confesse, développe quoique ce soit, depuis le départ je lui étais transparente. Il était là pour moi et non l’inverse et puisque je voulais tout donner il prendrai encore plus.

 

Il ne veut pas d’une autre que moi.

 

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